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Ananda Loka
(La félicité)

Shiva est la divinité des divinités :

Ananda Loka est le 7eme cercle de l'énergie ou encore le 7eme ciel, il est le lieu où Shiva et Shakti s'unissent en la pure subjectivité de l'être. L'énergie de ce plan est non seulement à l'origine de toute la manifestation, mais reste également présente jusqu'à son aboutissement dans toutes les formes prises par son activité. La suprême réalité est à chaque instant débordante de sa seule vérité. De manière ininterrompue, elle déverse sur ce monde et sur les êtres sa jouissance surabondante et infinie : « Je suis tout ce qui est, et cela est jouissance ».

Shakti est l'Amour de Shiva :

Les individus ne pouvant percevoir cette union, au centre d’eux-mêmes, s’en tiennent à la périphérie des sens. Entraînés par la danse du Seigneur Shiva, ils restent comme prisonniers des formes prises par cette activité, tant du point de vue extérieur dans lequel ils ne voient qu’objets indépendants, que du point de vue intérieur dans lequel il n’y a que conscience de l’ego en quête de leur appropriation. De fait, les êtres ne peuvent réaliser qu’il s’agit de la Shakti du Seigneur, qui est non seulement toute tournée vers lui, mais est en fait contenue en lui, en son sein.

 

Cette Union est la jouissance de l'Être :

Lorsque le Sujet, par sa seule prise de conscience et l’énergie qui en émane devient son propre objet, il s’exerce une activité objective et formelle relative à un état d’être subjectif et absolu, il y a bien ainsi acte de conscience ou conscience en acte et cela est ressenti comme suprême activité.

De fait, il n' y a rien à faire, rien à accomplir, rien à obtenir, rien à réaliser, qui ne soit extérieur à Soi. Il n'y a rien non plus, à surajouter, rien à enlever, rien à désirer, rien à haïr, qui ne soit déjà parfaitement accompli, patent et véritable. Il n'y a pas non plus, et en aucune manière, de hiérarchie, de supériorité ou d'infériorité, de maître et de disciple, de ce qui est en bas ou de ce qui est haut, de ce qui est misérable ou puissant, qui ne soit parfaitement égal, identique et équanime. Il n'y a seulement qu'à se laisser porter par l'énergie spontanée du Sujet qui est lui même l'Objet de tous ses désirs, car à ce stade éminent, la Shakti est dit-on parfaitement infuse en Shiva. Tout n'est ici et maintenant, qu'une seule et même énergie, qu'une seule et même personne, l'être conscient de lui même, immergé dans une profonde et totale béatitude, pleine et entière. (Cit-Sakkti, ou Sat-Cit-Ananda). Être, conscience et béatitude.

 

Le Mystère du Rêveur Rêvé :

Une façon d'appréhender le jeu interdépendant de Shiva et de Shakti est de considérer cette proposition :

"L'être a comme hérité de lui-même, y trouvant grâce, il se trouve porté par sa belle énergie et voit depuis tourner autour de lui 36 chandelles !"

La prise de conscience est sans cause et vient spontanément, elle est la Shakti ou encore la Yoni qui ensèrre. Ce qui est saisi est Shiva, la seule présence mystérieuse de qui existe, et de ce qui ne se connaît pas, ou encore le Linga. Depuis cette Union indivisible, selon le jeu de la forme et du sans-forme, l'être joue, à l'image de sa propre aventure, le drame de la transmigration, le devenir des êtres dans la roue de la fortune, de la naissance et de la mort. Etant lui même indivis, il s'oppose et se reflète sur lui même en le jeu des contraires et de la dualité, pour devenir une 'indivi-dualité' manifestant comme extérieurement de ce qu'il ressent intensément à l'intérieur de lui même, soit la formulation : "Je suis Je, et Ceci est Ceci", encore appelée Science pure ou véritable (Shuddhavidya).

La première partie de cette formulation 'Je suis Je' peut s'éprouver en distinguant chez l'autre, sujet connaissant, ce qui est de même essence que Soi. La deuxième partie de cette formulation 'Ceci est Ceci' peut s'éprouver en distinguant, dans l'univers, objet connu, toutes les modalités de l'être qui sont également et strictement de même essence que le Soi. En définitive toute la réalité qui se manifeste par paires d'opposés, est une connaissance qui relie le Sujet connaissant et l'Objet connu, exactement comme le reflet de l'être à son image. (Shiva/Shakti).

 

Le Grand Vide :

L'Union est comme cette pièce de monnaie qui se trouve avoir deux côtés, l'illusion est de n'en percevoir toujours alternativement qu'un seul côté. Pour la percevoir simultanément dans son ensemble, il faut pouvoir se situer comme depuis le vide d'un espace et d'un temps non manifesté, infini et parfaitement inconnu, ou encore depuis ce lieu paradoxal qui transcende toutes notions, au delà de toutes pensées. (lieu exclusif du seul Maître de l'énergie)

La personne universelle n’est pas différente de la personne individuelle, simplement elle n’existe pas à soi dans la conscience particulière, mais dans la conscience universelle, hors du temps et de l’espace, car les engendrant elle-même. L’amour qu’elle a pour toute chose n’est pas différent de l’amour que les individus portent à leurs objets d’affection, simplement son amour s’étend de la conscience indifférenciée aux objets terrestres.

Ou encore en citant Abhinavagupta :

«Quand l’objectivité est nettement manifeste, il s’agit de l’État de Veille (Jagrat). Quand cette objectivité se manifeste de manière intermittente et fluctuante, il s’agit de l’état de rêve (Svapna). Quand elle cesse complètement de se manifester, on est dans le sommeil profond (Susupti). Quand il y a supra-conscience et sujet conscient, il s’agit du quatrième État qui les contient tous et les transcende (Turya). Quand l’objectivité a disparu au niveau individuel et est pleinement active au niveau global, il s’agit de Turyatita, ultime et suprême état du Soi, l’état de la plénitude absolue du Soi. Il est l’ininterrompu, être, conscience et béatitude absolue».