Sexe & Sacré
L'extase est la forme de l'énergie par laquelle le monde est créé, maintenu et détruit. La jouissance et la souffrance sont les deux versants d'un seul et même sommet d'extase. Là où se trouve la souffrance, la jouissance n'est pas loin, et inversement là où se trouve la jouissance, la souffrance est également toute proche. Certains parfums capiteux, exhalés par des floraisons particulièrement odorantes, peuvent ainsi être à la fois nauséabonde et agréable. De la même manière, on ne saurait dire parfois, de certains cris amoureux, s'ils proviennent du plaisir ou de la douleur. L'étrangeté de cette situation réside dans la présence d'un centre ou point irrémédiable d'inflexion. C'est là où les tendances s'inversent et se contredisent autour d'un équilibre mystérieux. Ce point contient le vide dans lequel réside l'aléa, sans quoi il n'existe pas d'inflexions, de revirements ou de sortilèges. Le vide n'a pas de préférence pour le développement ou pour la résorption, pour le jour ou pour la nuit, pour la naissance ou pour la mort. Cet espace paradoxal, fait de pure lumière et de vibration, est la substance de l'univers, l'essence subtile de toute existence. Il est ce lieu en dehors de toute mesure où réside pour l'éternité le seul Sujet concient (Aham). Son unique préoccupation est de jouir de tous ses penchants. En lui n'existent aucun souci, aucun bien ni mal. Cet état est sans support, vide par excellence, il est le lieu où tout existe en la conscience de manière purement virtuelle. Lorsque ce Bindu entre en vibration, il se produit une grande félicité, une extase amoureuse démesurée, procurant pour celui qui l'éprouve une sensation sans limite. Selon la philosophie tantrique tous les éléments de la nature sont le produit de cette sorte d'extase. La création entière serait ainsi semblable à un jet de sperme jaillit de la conscience. Sous l'effet de la vibration et de l'énergie engendrée, la conscience se transforme en autant de métamorphoses, prend toutes sortes d'expressions extatiques en autant de formes figées. Le spectacle de cette incontinence amoureuse est comme une projection de sperme gélifié sur la toile invisible de la conscience.
Selon cette même idée, la conscience prend en Prittivi , la Terre, la forme la plus concrète du monde apparent. La conscience étend son règne minéral à l'infini observable et la création s'arrête, pour ainsi dire, à ce point terminal. La Terre apparaît alors comme pur objet dessiné au sein de la conscience absolue, support inconscient agglutiné en forme de sphères gigantesques au niveau cosmique, assumant les formes de vallées et de pics au niveau des planètes et prenant enfin des formes de finitudes diverses et variées au niveau de notre terre mère. De par son épouse Parvati, les montagnes et les vallées forment le manteau cosmique dont se revêt Shiva, pleines et heureuses retrouvailles d'une conscience douée d'une certitude indestructible de Soi, étreinte aussi langoureuse et interminable que peut l'être l'apparente immuabilité des paysages sculptés dans la roche.
Chaque élément de la nature renvoie ainsi à une forme d'extase et de prise de conscience. Toujours selon cet exemple, lorsque vous marchez sur de la simple terre, du macadam ou des cailloux vous marchez en réalité sur de la conscience en état d'extase ... Voir cela c'est voir Svatantrya la libre volonté de la conscience emplie d'une félicité intérieure débordante d'extase. Il en est de même de tous les éléments de la nature et de toutes les formes d'expressions de la vie. Le yogi qui voyage dans la conscience, voit chaque forme visible et observable comme autant d'expressions particulières de cette incroyable profusion de félicité. Savourer la nature subtile de chacune de ces formes donne une connaissance intime et directe de la conscience. Ce language est universel, et son dictionnaire comporte pour notre seul plaisir un nombre incalculable de mots, de verbes, de qualificatifs et d'articles.
Bonne lecture...
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